Madame la Présidente,
Ce CSAL s’ouvre dans un contexte politique dont nous mesurons aujourd’hui toute la gravité.
Pour nos organisations syndicales Solidaires Finances Publiques Paris et CGT Finances Publiques Paris, la récente nomination ce dimanche 22 septembre du nouveau gouvernement, après deux mois de tractations nauséabondes, matérialise et parachève le véritable outrage à la démocratie commis par un Président résolument déterminé à mépriser le résultat des urnes.
En effet, après une dissolution de l’assemblée qui aurait pu porter l’extrême-droite au pouvoir, une majorité de Français a tenu à exprimer :
- d’une part un désaveu fort et une volonté claire de rupture avec la politique conduite par la majorité présidentielle
- et d’autre part une détermination à faire barrage au Rassemblement National.
Or, nous sommes aujourd’hui face à un Président qui décide seul de mépriser cette double aspiration.
En refusant de nommer un.e Premier.e Ministre issu.e des rangs de la coalition arrivée en tête aux élections, Macron s’oppose à l’alternance démocratique ainsi qu’à la rupture attendue avec ses orientations politiques (pourtant à l’origine de la crise politique et sociale que nous traversons).
En nommant un premier Ministre issu des Républicains (la formation qui a obtenu le moins de député.es à l’Assemblée), il place par ailleurs l’extrême droite en position d’arbitre et s’assure parallèlement que l’aspiration à l’abrogation de sa très impopulaire réforme des retraites ne soit pas satisfaite. Une réforme massivement rejetée et qui a un joué un rôle majeur dans la cristallisation des mécontentements.
Un cap supplémentaire vient d’être franchi avec l’annonce, le 22 septembre dernier, de la composition du nouveau gouvernement constitué d’un agrégat des principaux partis perdants de l’élection. Ce gouvernement, enraciné très à droite de l’échiquier politique (avec notamment un ministre de l’Intérieur connu pour sa proximité idéologique avec les thèses de l’extrême droite et des ministres ayant participé à « la Manif’ pour tous ») ne peut être qu’un signal envoyé au Rassemblement National.
Et que dire de l’exigence de rupture exprimée dans les suffrages quand la formation qui compose majoritairement ce gouvernement est celle du parti présidentiel lui-même avec des ministres de l’ancienne équipe qui sont même reconduits dans leurs fonctions…
Pour Solidaires Finances Publiques Paris et la CGT Finances Publiques Paris, il s’agit là, en plus du déni démocratique qu’il implique, d’un choix qui témoigne de l’irresponsabilité d’un Président qui a provoqué une crise démocratique dans laquelle il enracine durablement et dangereusement le pays.
C’est d’ailleurs pour réclamer l’abrogation de la réforme des retraites, pour exiger des services publics de proximité et une revalorisation de nos rémunérations que Solidaires Finances Publiques Paris et la CGT Finances Publiques Paris, appellent ensemble à la grève et à manifester massivement demain.
Mais si, avec la constitution de ce gouvernement Emmanuel Macron n’a pas hésité à franchir une étape supplémentaire dans l’affichage du mépris dans lequel il tient l’expression démocratique, vous n’avez pas non plus, Madame la Présidente, à l’échelle de la DRFiP Paris, eu le moindre scrupule à passer un nouveau cap dans le mépris que vous manifestez pour le dialogue social ; dans celui que vous nourrissez pour cette instance, pour les représentant.es des personnels et en conséquence pour l’ensemble des agent.es de cette Direction.
Le 5 septembre dernier, en effet, nous étions réuni.es, pour débattre notamment de la nouvelle politique d’accueil dégradé que vous êtes résolue à mettre en œuvre à marche forcée.
Vous nous aviez alors présenté des documents évoquant votre dispositif censé prendre effet le 1er octobre (date que vous aviez déjà arrêtée en juin dernier avant même que le CSAL ne soit reporté en raison du contexte électoral, politique et social du moment).
Les débats ont fait état d’une large hostilité des organisations syndicales présentes qui, couplée à votre obstination à ne tenir aucun compte de nos interventions, s’est même soldée par un choix fort de Solidaires Finances Publiques Paris et de la CGT Finances Publiques Paris : celui de quitter la séance.
Ce choix n’est jamais pour nous, pris à la légère, il implique de renoncer à exposer le fruit d’un travail collectif d’examen critique nourri par les observations et témoignages formulés par nos collègues sur le terrain et dont nous nous faisons les porte-parole en séance, mais il nous semble que c’est la seule option qui s’impose dès lors que vous refusez de les entendre, d’y répondre et que vous les dédaignez comme vous le faites si ostensiblement.
Cette fois vous êtes même allée bien au-delà de ce dédain : alors que des débats s’étaient articulés autour de la chronologie mentionnée dans nos documents de travail, nous avons appris, par nos collègues, dans les jours suivants la séance du 5 septembre que votre nouvelle politique d’accueil, vivement combattue par nos OS, serait non seulement déployée comme toujours en dépit de notre opposition collective mais qu’elle serait de surcroît appliquée par anticipation non plus le 1er octobre mais dès le 9 septembre. Vous déployez donc en toute irrégularité un projet selon un calendrier différent de celui qui nous a été présenté dans cette instance. Après avoir précédemment quitté la séance, nous considérons qu’il s’agit là d une nouvelle provocation inédite qui nous amène à nous questionner désormais sur le crédit à accorder aux documents que vous nous présentez en instance et à l’instance elle-même puisque vous vous réservez à tout moment toute la latitude de vous en affranchir !
Concernant les sujets à l’ordre du jour de ce CSAL, nous vous avons demandé avant de débattre de la mise en place des blocs fonctionnels que vous nous produisiez un retour d’expérience de l’organisation analogue qui a été mise en place dans le SIP du 17ᵉ.
Bien que cette organisation préfigurait largement, dans les faits, le déploiement de ces blocs fonctionnels, elle n’a jusqu’ici fait l’objet au printemps dernier, en CSAL, que d’une présentation prétendument prospective alors même qu’elle était déjà effective depuis près d’un an, au plus grand mépris des règles qui imposent dans cette instance un débat préalable à toute modification de l’organisation.
Pourtant, le témoignage des collègues du service aurait été éclairant et aurait mis en lumière les difficultés et la dégradation du service public consécutives à la mise en place de ces blocs fonctionnels que vous entendez généraliser dans le seul but inavoué de gérer la pénurie de nos emplois.
Partout dans Paris, des collègues de SIP nous interrogeaient, inquiet.es, pour savoir si leur service serait le prochain à être déstructuré.es sur le modèle du 17ᵉ.
Vous n’avez bien entendu pas daigné satisfaire notre demande qui nous aurait permis de disposer de l’éclairage de cette expérience du SIP 17e afin d’alimenter en toute transparence les débats.
Peut-être n’avez-vous pas eu le temps de transfigurer le bilan qu’on peut retenir d’un tel échec car, disons-le, les seuls bilans que vous nous proposez sont systématiquement lissés de toutes leurs aspérités et expurgés des nombreux dysfonctionnements qui ont émaillé le déploiement des projets tous plus nocifs les uns que les autres.
Et le « Retex » concernant la mise en place de l’antenne SIE de Vierzon ne fait pas exception :
- Peu de choses sur les difficultés de mise en place d’une antenne en grave sous effectif avec des personnels non formés et qui a nécessité une mise en œuvre décalée dans le temps et un transfert étalé sur plusieurs mois alors que les emplois au sein des SIE parisiens avaient été supprimés dès le 1er septembre 2023 ;
- Rien sur les difficultés liées à l’absence de maîtrise d’un tissu fiscal déraciné, notamment au regard de la CFE alors que nous vous avions alertée sur le fait qu’il était extrêmement compliqué de mettre à jour les locaux à distance sans connaître finement les particularismes du tissu parisien ;
- Rien, bien évidement, sur le ressenti des personnels des SIE exportateurs qui ont été dessaisis de missions dans les lesquelles ils et elles s’étaient investie.s de longue date, notamment au sein des cellules CFE, ou encore sur la démotivation de jeunes agent.es à qui on a demandé de se former et de prendre en charge des missions qui devaient partir prochainement ;
- Rien sur le chaos engendré par les dysfonctionnements du Guichet Unique pour les formalités qui ont pourtant conduit la présidente de l’Ordre des experts-comptables de Paris à faire part de son mécontentement à l’encontre du ministère de l’Économie qui a, selon elle, précipité le lancement de l’outil sans consultation adéquate avec les parties prenantes. Une triste habitude au sein de notre ministère…
- Pas un mot non plus sur les conditions de travail déplorables de nos collègues de Vierzon dont l’installation a été retoquée par l’inspection du travail.
- Et rien enfin sur la nécessité pour les SIE parisiens d’apporter, quand ils le peuvent, avec si peu d’emplois restant, une aide technique à ce service censé les décharger.
Bref, vous nous présentez un Rétex qui n’a qu’un seul but :
- nier les évidences ;
- nier les échecs de cette déstructuration ;
- nier la dégradation du service public et la dégradation des conditions de travail des agent·es induites par la création de telles antennes.
Il s’agit plus fondamentalement de nier l’essence de ces antennes SIE qui ne sont en réalité que l’instrument d’une entreprise de délocalisation et de démantèlement de notre administration.
Ce démantèlement vous entendez le poursuivre en continuant de dépecer les SIE parisiens, au mépris notamment de la perte de connaissance du tissu fiscal que cela implique et de l’essentielle proximité que nous devons conserver avec nos contribuables, y compris les entreprises, comme l’a démontré le piratage des comptes professionnels en juillet et la nécessité pour ces professionnels de se présenter physiquement à l’accueil de nos centres des finances publiques afin de réactiver les comptes.
Vous ne tirez aucun enseignement des échecs de Vierzon et ne comptez pas davantage tenir compte des critiques et observations que nous vous relayons.
Rien n’arrêtera votre boulimie destructrice et vous mettrez en place l’antenne de Fécamp en dépit de toutes nos alertes puisque votre priorité est désormais de vider Paris de ses services publics. Il s’agit de libérer des immeubles qui abritaient nos services, ceux qui rendaient un service public de proximité que vous sacrifiez sans vergogne sur l’autel de la nouvelle politique immobilière.
Fort de ce constat et à la lumière du mépris affiché lors du dernier CSAL, les élu.es de Solidaires Finances Publiques Paris et de la CGT Finances Publiques Paris ont décidé de quitter la séance en déplorant, une fois de plus, l’état d’un dialogue social qui n’a jamais été aussi dégradé à la DRFiP pourtant malmené depuis de trop nombreuses années.