L’admission au séjour au titre du travail doit être de plein droit pour les travailleurs et les travailleuses migrant·es.
Un projet de loi sur l’immigration est en préparation depuis de nombreux mois. Le projet de loi appelé « Contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » a fait l’objet d’un vote et d’un grand nombre d’amendements par la commission des lois du Sénat en mars 2023, ce projet sera étudié par le Sénat à partir du 6 novembre prochain.
Dans ce contexte, la CGT tient à affirmer un socle de revendications dans la continuité des positions de congrès confédéraux, du livret d’accueil des travailleur-euse-s migrants validé par la Commission Exécutive Confédérale et l’expérience militante avec les travailleurs, tant dans les grèves que lors de nos permanences organisées par nos Unions Départementales.
Ce socle revendicatif tire le bilan de la circulaire du 28 novembre 2012 visant à préciser les conditions d’examen des demandes d’admission au séjour au titre du travail déposées par des ressortissant-e-s étrangers en situation irrégulière et des conditions de régularisation de ces dernier-ière-s depuis dix ans.
Cette circulaire est le résultat de quatre années de luttes (2008-2012) et de grèves qui ont rassemblé plus de dix mille travailleur-euse-s, soutenus par la grande majorité des syndicats et des principales associations engagées auprès des migrants.
Ce texte, bien qu’il consacre un grand nombre d’avancées pour les travailleur-euse-s migrant·es a toujours été, pour la CGT, qu’une étape dans son combat pour la justice sociale, l’égalité des droits et la reconnaissance de la place des travailleur-euse-s migrants dans notre société.
Partant de ces principes, La CGT porte la plateforme revendicative suivante :
La CGT revendique pour les travailleur-euse-s migrants un titre de séjour de plein droit.
L’application de la circulaire du 28/11/2012 a été et reste diversement appliquée par les préfectures et avec des modalités et des critères fixés par ces dernières. En conséquence, la délivrance du titre de séjour par le travail doit être un principe inscrit dans la loi, afin d’éviter tout arbitraire préfectoral, que la délivrance du titre soit de plein droit. Les modalités de cette délivrance de titre de séjour par le travail doivent être basées sur la simple preuve de la relation de travail : bulletins de paye, chèques, virements ou constats de l’inspection du Travail en cas de travail dissimulé pour les salarié-e-s.
La CGT revendique la fin du pouvoir de l’employeur dans la délivrance au salarié-e migrant du titre de séjour par le travail.
Aujourd’hui, la condition préalable à la régularisation dépend du bon vouloir des employeurs qui ont constitué leur système économique sur le dumping social et refusent, la plupart du temps, de remplir les cerfas sauf à y être contraint par la grève.
L’admission au séjour au titre du travail doit être de plein droit pour les travailleurs et les travailleuses migrant·es
Pour les salarié-e-s travaillant sous alias, l’attestation de concordance pourra être remplie par l’employeur, par des élu-e-s du personnel ou des collègues de travail, par l’inspection du Travail en cas de travail dissimulé ou de constatation de la relation de travail lors de contrôles.
La CGT revendique l’égalité de traitement entre salarié-e-s pour la délivrance du titre de séjour par le travail
L’admission au titre de séjour par le travail doit s’appliquer de manière identique aux travailleur-euse-s quel que soit leur statut — CDI, intérimaires, CDD — ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Ainsi la circulaire du 28/11/2012 exige un minimum de cinq ans de présence sur le territoire pour un salarié-e intérimaire contre trois pour un·e salarié-e en CDI.
Les employeurs des branches de la construction-travaux publics, de la logistique et de la restauration collective font appel aux entreprises de travail temporaire pour couvrir les postes de travail les plus pénibles. C’est un moyen pour flexibiliser la main-d’œuvre dans son ensemble et se défausser de leur responsabilité dans l’utilisation de travailleur-euse-s sans titre de séjour valide.
La CGT revendique l’égalité de traitement pour les travailleur-euse-s sous statut d’autoentrepreneur.
Les travailleur-euse-s migrants sous statut d’autoentrepreneur subordonnés à un client unique (plateformes) ou faisant plus de 50 % de leur rémunération avec le même client doivent bénéficier des mêmes possibilités de délivrance de titre de séjour par le travail que les salarié-e-s. Car dans les faits, il s’agit de salariat déguisé, possibilité offerte aux plateformes de se dégager de l’ensemble de leurs obligations sociales.
La CGT revendique la prise en compte des inégalités que vivent les femmes salariées migrantes.
Nombreuses sont les femmes salariées migrantes qui travaillent dans les secteurs de l’aide à la personne, la restauration collective, le nettoyage, l’hôtellerie-restauration, la grande distribution et se voient imposer un temps partiel de travail. Cette situation, qui a été partiellement prise en compte dans la circulaire du 28/12/2012 et rappelée par la FAQ et par la note des ministères de l’Intérieur et du Travail du 12/07/2012, reste cependant un frein, dans certaines préfectures, à la délivrance de titre de séjour par le travail.
En conséquence, ces femmes sont victimes de conditions de travail exténuantes, de bas salaires et de l’impossibilité de bénéficier d’une autonomie réelle par l’absence de titre de séjour.
Pour ces raisons, la CGT revendique l’égalité de traitement pour la délivrance du titre de séjour par le travail pour les femmes salariées migrantes en temps partiel.
La CGT revendique la délivrance d’un récépissé avec autorisation de travail lors du dépôt de dossier.
Lors du dépôt de dossier pour l’admission au titre de séjour par le travail, le ou la travailleur-euse se verra remettre un récépissé avec autorisation de travail, valable durant la période d’examen du dossier. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, avec la délivrance de récépissé sans AT, situation qui peut durer plusieurs mois et qui fragilise le salarié dans son emploi.
La CGT revendique l’obligation pour les OPCO de garantir une formation Français/Langues étrangères à tous les travailleur-euse-s migrants admis au titre de séjour par le travail.
Les OPCO sont financés par les salariés et les entreprises et, à ce titre, ont vocation à permettre aux travailleur-euse-s de maîtriser la langue française. Cette question est essentielle pour que celles et ceux-ci puissent faire valoir leurs droits, lire les contrats de travail, comprendre les consignes de sécurité et permettre d’accéder ultérieurement à des formations qualifiantes. En plus des relations de travail, la maîtrise de la langue favorisera leur intégration.
La CGT revendique la suppression des dispositions du décret de 2021 en cas de changement d’employeur pour les travailleur-euse-s migrants disposant d’un titre de séjour « salarié-e ».
Le décret de 2021 constitue un recul en droit constant pour des salarié-e-s migrant·es changeant d’employeur. Depuis cette date, le nouvel employeur doit faire une demande d’autorisation de travail. Idem pour les salarié-e-s intérimaires travaillant pour la même entreprise de travail temporaire, pour des contrats de mission dont la durée est égale ou supérieure à trois mois. Cette mesure est discriminatoire par rapport aux autres travailleur-euse-s et même aux travailleur-euse-s étrangers bénéficiant d’un autre titre de séjour (Vie privée Vie Familiale, passeport talent…).
Cette mesure discriminatoire est aussi un obstacle aux renouvellements des cartes salarié·es. Le renouvellement, tout comme l’attribution du titre de séjour salarié, doit se faire sur la simple preuve de la relation de travail ».
La CGT revendique le renforcement des effectifs en préfectures.
Le manque de personnel a des traductions négatives concrètes sur le traitement des demandes d’admission au titre de séjour par le travail et sur le renouvellement des titres de séjour. Les effets pervers de cette situation sont le développement d’officines qui vendent des rendez-vous ou la perte
d’emploi, faute d’avoir pu renouveler son titre de séjour en temps et en heure.
La CGT revendique le maintien des accueils physiques en préfecture.
La dématérialisation est une barrière supplémentaire et discriminatoire pour les usagers, a fortiori quand ils sont étrangers (rapport Défenseur des Droits).
La CGT revendique le droit au travail légal pour les demandeurs d’asile.
Suppression de l’interdiction faite aux demandeurs d’asile de travailler légalement pendant la période d’instruction de leurs dossiers. Le fait de travailler est un facteur essentiel d’intégration dans notre société.
Montreuil le 11/10/2023