“Il faut en finir avec la souffrance, l’indignité et l’exclusion. Désormais, nous mettrons l’homme à l’abri du besoin. Nous ferons de la retraite non plus une antichambre de la mort mais une nouvelle étape de la vie.”
Extrait du premier discours d’Ambroise Croizat en tant que ministre du Travail
1- Notre système actuel de retraite
Système actuel de retraite
- Un système financé principalement par la cotisation sociale : salaire socialisé et rapport capital/travail
- Un système qui devait être universel et unifié qui sous pression patronale sera organisé en trois niveaux :
- Une retraite de base mise en oeuvre par la Sécurité sociale
- Une retraite complémentaire obligatoire mise en oeuvre par l’AGIRC-ARCCO avec certaines spécificités (points et répartition, équilibre budgétaire, etc.)
- Une retraire supplémentaire : facultative et par capitalisation
- Au delà du régime Général différents régimes spéciaux ou « Pionniers » qui assurent la reconnaissance en matière de retraite de spécificités professionnelles
- Droits spécifiques : Service actif et départs anticipés
- Organisation spécifique : Intégration des régimes (base et complémentaire), ex : cheminots
Taux de remplacement ou salaire de remplacement
Le taux de remplacement global pour une carrière complète = 70 à 75%
Les réformes paramétriques = une dégradation progressive
L’âge de départ
- Dans le public
- 62 ans pour les sédentaires
- 60 ans, 57 ans, 52 ans pour les agents classés en service actif
- Dans le privé
- Avant 62 ans = départs anticipés
- 62 ans si taux plein (exemple: né en 1957 = 166 trimestres; né en 1973 = 172 trimestres)
- 67 ans âge automatique du taux plein
2- Faut il réformer le système ?
Des réformes dans l’intérêt du capital !
La réforme de 2019 mise en échec !
En 2019, après les réformes « paramétriques » ou visant certains régimes, une grande réforme en deux lois pour « transformer » notre système de retraite.
- Un long cycle de concertation et rapport Delevoye
- Un changement de logique radical avec une actualisation de techniques existantes :
- Cotisations définies (mais répartition)
- Caisse unique et étatisation
- Points au nom de la justice et pilotage automatique
- Une loi organique : règle d’or
- Pas adoptée au Sénat mais dans les faits appliquée aujourd’hui avec d’autres mécanismes (Programme de Stabilité Budgétaire)
- Une loi ordinaire : fin des régimes, caisse unique, ensemble de la carrière, 85% du SMIC etc.
La mobilisation a joué un rôle central dans l’abandon de la réforme !
Pas d’urgence à réformer !
Un système solide budgétairement !
- Financement assuré encore à 78% par les cotisations sociales en 2019 (hors effet crise sanitaire et ensemble du système de retraite)
- Part des retraites stabilisée à 14% du PIB, avec baisse prévue à 13 ou 11 3 en fonction des scénarios du Conseil d’orientation des retraites (effet réforme)
- Financement à court terme équilibre atteint avant crise pas de problème
- Financement à long terme les ressources disponibles sont très larges avec une autre politique, la CGT fait de nombreuses propositions!
Un système de retraite protecteur !
- 16,9 millions de retraités percevant un droit direct
- 1,029 million de retraité percevant un droit dérivé (réversion)
- Le taux de pauvreté des seniors à la retraite est de 7% contre 32 % pour les séniors NER (ni en emploi, ni en retraite) et contre 14,3% pour la population globale.
332 milliards d’euros qui échappent au capital grâce à l’organisation actuelle du système de retraite !
La prétendue urgence du gouvernement cache une volonté de récupération au service du capital.
Un conquis solide grâce à ses fondamentaux !
- Haute socialisation des risques et solidarité la plus forte entre les travailleurs
- Retraite de base intégrée au sein de la Sécurité sociale
- Concerne l’ensemble des travailleur.euse s (salarié du privé) indépendamment de leur entreprise, initialement la Sécurité sociale devait même concerner l’ensemble des travailleur.euse s
- Indépendance comptable et gestionnaire vis à vis de l’Etat
- Un budget différent et donc en partie protégé des aléas politiques
- Une ressource spécifique avec sa propre dynamique les salaires grâce aux cotisations
- Remise en cause de plus en plus forte
- Echappe aux marchés financiers et au marché
- La retraite est un droit et un non un produit de consommation (comme la capitalisation)
- La répartition permet d’échapper à la logique de l’épargne
Maintenir les dépenses de retraite : un choix contre les besoins de la société !
- L’objectif, comme en 2019, le gouvernement veut limiter les dépenses de retraite alors que le nombre de retraités va
augmenter - Conséquence : L’ajustement du système se fera essentiellement par la diminution des pensions, et secondairement par un report
de l’âge effectif de la retraite. - Remettre en cause le droit à la retraite et appauvrir les retraités est un choix de société quant à l’utilisation des richesses que les travailleur.euse.s produisent !
3- La réforme Macron 2023 et ses conséquences, ce que l’on sait !
Au 11 janvier après des annonces et un simulacre de concertation n’est pas terminé
- Calendrier: « entrerait en vigueur au 1er septembre 2023 » (E Borne, 11 janvier 2023)
- Méthode: une réforme paramétrique et passage dans une loi budgétaire (risque 49 3 la loi de financement de rectificative de la Sécurité sociale
- Mesures principales :
- Report de l’âge légal de départ de 62 ans à 64 ans
- Accélération réforme Touraine 2014 avec une durée de cotisation portée à 43 annuités dès 2027 (et non 2035)
- Mesures d’accompagnement
- Départs anticipés
- Suppression des régimes spéciaux
- Révision des « Eléments de solidarité »
- 1200€ de pension minimum pour une carrière complète au niveau du SMIC
La réforme au 11 janvier 2023
Accélération de la réforme Touraine : de l’augmentation de la durée de cotisation déjà prévue
Augmentation progressive de l’âge légal de départ
Les conséquences d’un report de l’âge de départ à 64 ans
- 1. Précarité: Repousser l’âge de départ la retraite, allonger une période comprise actuellement entre 58 et 62 ans durant laquelle les travailleurs ne sont plus en activité (environ 20% et qui constitue un « sas de précarité » ou un allongement des « périodes de précarité » avant la retraite
- C’est donc augmenter le nombre de personnes au chômage, malades, invalides et les besoins en financement vont se déplacer de la branche retraite à celles de ces risques (pour un euro en moins lié à la réforme, cela fait 0 5 centime en plus sur les autres risques). Les périodes de précarités en fin de carrière sont plus importantes pour les ouvriers et les employés que pour les cadres et les professions intermédiaires
- Au lieu d’être à la retraite et face à la précarité, les seniors viendront grossir l’armée de réserve tout en créant un nouveau problème à résoudre, celui de « l’emploi des seniors »
- 2. Santé: Plus on repousse le départ à la retraite
- Plus les risques d’y arriver en mauvaise santé augmentent tout en ayant. Espérer profiter du début de sa retraite en bonne santé ne sera plus possible
- Le report de l’âge du départ conduirait à une dégradation des conditions de travail partir plus tard signifie travailler plus longtemps dans de mauvaises conditions, avec un impact sur la santé des travailleurs et futurs retraités
- 3. Inégalités en raison du genre, du handicap et de la pénibilité: la réforme va mécaniquement toucher plus les femmes et professions pénible tout en remettant en cause les protection existantes (droits familiaux et régimes spéciaux) en proposant de pseudo solutions (compté pénibilité, etc
- 4. Changement de la logique fondamentale: car le système de retraite ne protégera plus mais sera placé au service de la politique économique néolibérale
Travailler plus longtemps, c’est une retraite plus courte
- La loi Touraine de 2014 a déjà compensé les gains d’espérance de vie des dernières années
- Inférieure à 65 ans, l’espérance de vie en bonne santé est en 2019 de 63,7 ans pour les hommes et 64,6 ans pour les femmes
- L’espérance de vie ne constitue pas un argument valable, sauf à considérer qu’il existerait un ratio naturel ou nécessaire entre le temps passé au travail et à la retraite dans une vie humaine, ce qui n’a aucun sens
La CGT défend une retraite à 60 ans, ce qui permettrait un départ en bonne santé pour une majorité de travailleurs.
La nouvelles réforme va faire baisser le temps passé à la retraite:
- La durée de carrière représente une part de plus en plus élevée de la durée de vie totale au fil des générations
- Travailler plus tard, c’est une retraite plus courte
- Avec la retraite Macron, la génération née en 1975 passera moins de vingt cinq années à la retraite, contre vingt sept années et demie
pour la génération née en 1950. Il faudra au moins attendre la génération née en 2000 pour revenir aux vingt six années passées à la
retraite des générations nées entre 1955 et 1965.
Supprimer les régimes spéciaux
La suppression des régimes spéciaux de retraite une mesure centrale dans le projet global de casse des services publics et professions , avec:
- La suppression des statuts professionnels ;
- La privatisation des entreprises publiques et des services publics ;
- La disparation de secteurs d’activités qui ont rendus possible le développement économique (par exemple les mines).
Une suppression justifiée par des difficultés budgétaires largement contestables:
- Les régimes spéciaux surcotisent et contribuent donc largement ;
- Les embauches en dehors du statut détériorent le ratio cotisants/retraités et les ressources des régimes ;
- Un surcoût temporaire des régimes en extinction ou avec des ratios (cotisants/retraités) qui vont se stabiliser
- Un pseudo surcoût actuel qui ne fait que refléter le coût d’un développement économique passé
Conséquences:
- Un recul des droits importants : d’âges moyens de départ allant aujourd’hui de 54 à 56 ans (catégories actives ou conduite) ou autour de 60 ans, on passerait vers un départ moyen à 62,63 ou 65 ans.
- Une mise en danger la santé des travailleurs de ces secteurs ces régimes sont pionniers en matière de reconnaissance de pénibilité du travail ( 3 x 8 heures, horaires décalés, stress et responsabilités fortes, expositions aux risques chimiques, etc.)
Pénibilité/contraintes d’exercice des métiers
- Les inégalités sociales de santé sont largement issues des conditions de travail et de la profession exercée. En 2020 selon l’observatoire des inégalités, à 35 ans, les hommes cadres ont une espérance de vie supérieur de 6 ans aux ouvriers Pour les femmes des mêmes catégories, la différence est de 3 ans
- Suppression des dispositifs existants (départs anticipés) au profit du compte professionnel de prévention (C2P), qui individualise les droits des salariés, n’est pas dédié à la retraite puisqu’il a avant tout pour objectif la réinsertion professionnelle et l’employabilité
- Un compte très peu utilisé au 1er janvier 2022 seul un peu plus de 1 500 000 salariés avaient ouverts leur compte sur les plus de 25 millions de salariés français alors que 61% des salariés sont exposés à au moins 1 critère de pénibilité soit 13 5 millions de personnes en France métropolitaine en 2017
- Pour rappel, les dispositifs de retraite anticipée, déjà défaillants avec une retraite à 62 ans, le seront encore davantage avec un âge de départ plus lointain et une durée de cotisation allongée
- Par exemple les retraites anticipées pour les travailleurs handicapés
- Les personnes en situation de handicap passent en moyenne huit années et demie sans emploi après 50 ans (contre 1,8 année pour l’ensemble de la population).
- Allonger la période de précarité sera donc fatale pour les travailleurs handicapés !
- Par exemple les retraites anticipées pour les travailleurs handicapés
Une réforme qui touchera plus les femmes
- A chaque fois que l’on repousse la durée de cotisation requise, on la rend toujours moins atteignable pour les femmes
- Les femmes rencontrent plus de freins et de difficulté à valider une carrière complète : la charge de la famille, le temps partiel subis (en 2020, 26% des femmes salariées à temps partiel le sont pour s’occuper de leurs enfants ou d’une personne dépendante), la probabilité de devenir aidant pour un proche en perte d’autonomie (60% des proches aidants sont des femmes) tous ces évènements sont autant de moments venant impacter la carrière professionnelle des femmes
Un changement de logique alors que…
- La réforme remet en question du principe que la retraite est un deuxième temps de la vie: les travailleurs ont participé à la production, à la richesse du pays et ont droit à cette nouvelle période de leur vie Ce n’est pas parce qu’ils ne produisent plus qu’ils ne sont plus utiles Ils participent à des associations, consomment servent donc la société.
- Une réforme qui compte sur la baisse des pensions: compte tenu de la précarisation des statuts, de la généralisation des carrières incomplète alors on assiste à une baisse mécanique (sans même les réformes) du niveau des pensions et ce très fortement exacerbé par la réforme macron car l’objectif est de contenir les dépenses et renforcer l’armée de réserve (cumul emploi retraite, emploi des senior, surcote décote).
- Une remise en cause des « éléments de solidarité », dispositifs qui font partie intégrante du système actuel, qui permettent la prise en compte des aléas de carrière ou de vie qui conduisent à des périodes d’interruption d’activité:
- Sous couvert de nouveaux droits ces dispositifs de solidarité vont être réduits voir supprimés périodes assimilées ( chômage, maladie, invalidité Droits familiaux/pension de réversion, Départs anticipés, Minimum de pension
- Alors que :
- 16,3% du montant des retraites de droit direct sont liés aux solidarités.
- 93% des retraités ont été concernés par au moins un de ces dispositifs, ce qui est considérable !
… les Français veulent partir à 60 ans!
- Aujourd’hui, la majorité des travailleurs en activité en France souhaitent partir autour de 60 ans
- Ils considèrent que 63,4 ans est un âge limite à partir duquel
- Il n’est pas acceptable de faire travailler les gens: c’est deux ans de moins que la proposition d’Emmanuel Macron!
- En majorité, les travailleurs pensent qu’ils pourront prendre leur retraite autour de 65 ans: la bataille des idées est là et les propositions CGT sont en accord avec les besoins des travailleur.euse.s
Le retour en force de la capitalisation
Le gouvernement dit vouloir sauver notre système par répartition mais:
- il a affaibli (a baissé le niveau des pensions
- il rend de plus en plus inaccessible la possibilité d’avoir une carrière complète.
Finalement, il proposerait de développer la capitalisation pou rapporter une réponse à des besoins en matière de retraite moins fiable que le système actuel et sous pression des fond s de pensions!
4- Ce que revendique la CGT
Un modèle à la hauteur des besoins et financé !
Revendications
- Départ à la retraite à 60 ans à taux plein.
- Retour aux 10 meilleures années pour le calcul de la retraite et les 6 derniers mois pour le secteur public.
- Départ anticipé à 55 ans ou un trimestre de départ anticipé par années d’exposition pour les salariés exposés à des facteurs de pénibilité.
- Assurer un niveau de pension (taux de remplacement) d’au moins 75% du revenu d’activité pour une carrière complète.
- Elever le minimum de pension au niveau du Smic CGT pour une carrière complète.
- Indexer les pensions sur l’évolution des salaires et sur celle des prix.
- Prendre en compte les années d’études et valider les périodes de recherche du premier emploi dès l’inscription à pôle emploi.
- Une politique volontariste d’égalité salariale femmes hommes, améliorant la retraite des femmes et abondant les ressources des régimes
Financer de bonnes retraites c’est possible !
Selon une étude un peu ancienne du conseil d’orientation des retraite COR. Il faudrait 100 à 120 milliards d’euros en 2050 5 à 6 points de PIB actuel) pour financer un système de retraites par répartition garantissant:
- une ouverture du droit à retraite à 60 ans
- une indexation sur les salaires
Pour cela, il faut modifier la répartition des richesses avec par exemple :
- Une augmentation des salaires de 5% qui dégagerait 9,5 milliards d’euros.
- La réduction du chômage grâce notamment aux propositions CGT en matière de planification économique, écologique et sociale pour permettre la création d’au moins un million d’emplois (800 000 privés, 200 000 publics) qui entrainerait 10 milliards de cotisations retraites nouvelles et 10 milliards d’euros d’économie en matière de chômage.
- L’augmentation du taux de cotisation de 2,5 points qui permettrait d’apporter 30 milliards d’euros.
Ces mesures et d’autres sont envisageables et pensée dans le cadre du projet CGT de transformation de la société.
Pour parvenir la solution est l’élévation du rapport de force !