Compte Rendu d’Audience SIE PARIS 10ème Nord
Face à une pénurie d’emplois d’une ampleur inédite, les agents du SIE de Paris 10ème Nord ont, en date du 13 juin 2017, sollicité auprès de la Direction Parisienne une audience afin d’évoquer les conditions de travail dégradées dans lesquelles ils évoluent, les surcharges de travail insoutenables auxquelles ils sont quotidiennement confrontés ainsi que leurs craintes de ne plus être en mesure d’assurer leurs missions compte tenu des perspectives de court terme susceptibles d’aggraver davantage encore la réalité de la pénurie subie.
Ainsi sur l’exercice 2017, l’effectif du service s’est avéré souffrir d’un des taux de déficit les plus élevés de l’ensemble des services parisiens concernant les agents de catégorie B (qui composent l’essentiel des emplois du service).
En affichant des valeurs inférieures de 4 agents B à l’effectif prévu au TAGERFIP au 1er Septembre 2016, le SIE ne pouvait que connaître de réelles difficultés de fonctionnement, des difficultés accrues par les particularités du tissu fiscal dont il a la charge (caractérisé notamment par un niveau important de défaillance). A cette situation déjà initialement préoccupante il faut ajouter l’impact de divers événements et aléas intervenus en cours d’année et qui sont venus altérer une situation de l’emploi déjà tendue (ou qui devraient à très court terme assombrir encore ce panorama) :
– Deux départs en retraite d’agents B en milieu d’année (en plus de celui subi en début d’année 2017)
– Un congé longue maladie qui a privé le SIE de la présence effective d’une collègue sur la majeure partie de l’exercice courant.
– Une autre collègue également en arrêt maladie depuis juillet. Son absence sera là encore durable sachant qu’elle est appelée à être prolongée par un congé maternité à suivre.
– Une absence pour durée indéterminée de l’adjointe du service.
– Le départ annoncé suite à mutations de trois agents B expérimentés et d’un agent C (affecté à la comptabilité)…
Tout était réuni pour qu’en laissant perdurer une telle situation -pire en la laissant se détériorer davantage encore- de réels dangers finissent par peser (compte tenu des cadences de travail), sur la santé des agents du service en proie à des risques d’autant plus grands qu’il ont depuis trop longtemps déjà été particulièrement sollicités pour faire face aux manques d’effectif (structurels sur ce SIE) en assumant des quantités de travail excessives.
Les maigres apports effectués sur 2016-2017 (2 ALD de catégorie C et 2 ALD de catégories B) n’ont pas suffi à compenser les départs et les postes non pourvus (deux départs de B ALD au 1er Septembre / 1 départ de C en retraite en plus des postes laissés vacants) et ont tout juste maintenu la pénurie à un niveau pourtant inquiétant.
L’audience demandée en juin a finalement pu se tenir (postérieurement à la CAP d’affectation des cadres B) le 21 juillet dernier à Réaumur en présence d’une délégation d’agents accompagnée de représentants des organisations syndicales Solidaires et CGT.
Bien que l’existence d’une situation critique n’ait pas été niée (mais comment aurait-elle pu l’être en pareilles circonstances ?) , les réponses apportées à ces difficultés désormais structurelles sur le SIE n’ont pas été jugées suffisantes et entretiennent même durablement et assez largement l’inquiétude de l’ensemble des collègues.
Les Emplois :
– La Direction a annoncé l’affectation de 2 ALD de catégorie B supplémentaires à la rentrée prochaine ce qui reste très en deçà des attentes des agents et n’est en aucun cas susceptible de combler le déficit à hauteur des manques actuels (et encore moins d’envisager un quelconque rattrapage du retard accumulé).
Cette réponse ne peut être perçue comme satisfaisante dans la mesure où elle aboutit à reconduire dans les faits (compte tenu des éléments évoqués plus haut) la même situation de pénurie que celle connue au 1er Septembre 2016 (soit – 4B).
Or cette situation a déjà été génératrice de stress et de trop lourdes surcharges de travail, elle a parallèlement dégradé de façon très significative des conditions de travail déjà préoccupantes (pour rappel en 2014 une première audience avait été demandée pour évoquer les difficultés de l’ensemble des services implantés Cité Paradis. Un sérieux déficit en termes de moyens humains avait déjà été largement souligné, la Direction avait fait l’aveu d’une forme d’impuissance en expliquant qu’elle en était réduite à jouer les « pompiers » et à tenter d’éteindre les incendies au moyen des seuls EDR disponibles. Comme les agents du SIE l’avaient alors justement prédit, cette mesure d’urgence ne constituait en rien un traitement de fond du problème qui ne pouvait dès lors qu’être appelé à resurgir. Le rôle de « pompier » assumé alors par la Direction parisienne ne pouvait, dans une telle configuration, qu’être appelé à se muer en celui de « pompier pyromane » faute de tout moyen approprié et de dispositif véritablement pérenne).
La réponse de la Direction qui se borne ainsi à n’amortir que les seuls effets des nouvelles absences (maladies, maternité etc.) du service sans remédier structurellement au déficit initial d’emplois ne peut suffire à apaiser les inquiétudes des agents sensiblement éprouvés par tous les efforts consentis ces dernières années et par les incertitudes qu’ils continuent de voir peser sur l’avenir.
Dans un passé encore récent, une nouvelle agente ALD (formée pour l’occasion à la matière) avait été affectée à la cellule RAR du SIE, entièrement vidée par des départs, pour être réaffectée dès l’année suivante au SIP 10ème Nord en souffrance également à cette période. Certains peuvent donc s’inquiéter qu’un traitement « flottant » analogue soit de nouveau réservé à un SIE en mal de stabilité.
Aujourd’hui, sur les 5 nouveaux arrivants prévus pour remplacer notamment les départs de plusieurs B expérimentés, seul 1 agent a une expérience du SIE. Dans le service beaucoup se demandent donc comment ils vont être en mesure de former leurs nouveaux collègues alors même qu’ils n’ont pas le temps matériel d’accomplir les tâches qui relèvent de la gestion courante. Ils attachent pourtant une importance toute particulière à la bonne intégration de nouveaux collègues au sein de leurs équipes de travail.
– La Direction a également tenu à évoquer l’affectation prévue de 3 EDR (1 cadre A, 1 cadre B et cadre C) à la rentrée. Là encore les agents du SIE accueillent avec une réelle circonspection cette annonce d’abord parce qu’ils ont parfaitement conscience qu’un apport d’EDR reste une mesure inadaptée à la nature de leurs difficultés. Il s’agit d’une réponse conjoncturelle à une problématique fondamentalement plus structurelle : des affectations faites pour une durée qui peut être limitée à deux mois ne sauraient en effet satisfaire une revendication qui vise à exiger des emplois pérennes suffisants.
Les réserves des agents trouvent enfin à s’exprimer parce que certains parmi les plus anciens d’entre-eux se souviennent également de 2014, date de la dernière audience, où la situation déjà critique du service avait été largement abordée : les EDR alors affectés au SIE 10e Nord ne l’étaient que très théoriquement (avec notamment un EDR qui n’a jamais été présent dans le service puisqu’en congés sur l’ensemble de la période qui couvrait sa mission préalablement à son départ en retraite).
Autres éléments de Réponses :
– Pour palier la faiblesse des moyens humains alloués, la Direction a également avancé des réponses « organisationnelles » et n’a pas manqué d’invoquer son désormais traditionnel argumentaire articulé autour d’une nécessaire « priorisation des tâches » à laquelle les agents ne prêtent visiblement pas les mêmes vertus miraculeuses que leur hiérarchie parisienne.
Outre ce que cette « priorisation » implique comme renonciations en termes de qualité de service public rendu, les agents redoutent, dans les faits, de devoir faire face à une succession de priorités appelées à s’enchaîner continuellement. Une priorité chassant d’abord l’autre avant de venir non plus s’y substituer mais s’y ajouter.
Il semble d’ailleurs difficile pour beaucoup d’agents de délaisser certaines missions connaissant tout particulièrement l’interpénétration de nombreuses problématiques en SIE : l’incitation au civisme fiscal passe par un traitement réactif de la défaillance, un bon suivi du RAR lui même impacte le civisme fiscal, etc.
Ce lien d’interconnexion indéfectible entre de nombreuses tâches du SIE (qui implique que la qualité de traitement de l’une améliore ou altère selon les cas le traitement d’une autre) prend d’ailleurs toute sa mesure avec un tissu fiscal tel que celui du 10ème arrondissement : volatile et caractérisé par un fort niveau de défaillance, il exige un suivi particulièrement soutenu et régulier. Dans ces conditions les collègues craignent une dégradation de la qualité du travail et redoutent également que cette priorisation des tâches ne soit pas de nature à véritablement pouvoir alléger le stress et la pression au travail…
La Divpro s’est ainsi engagée à dresser un état des lieux mensuel en matière de priorisations en consultant les agents.
La crainte reste cependant légitime de voir les efforts concentrés sur une mission particulière être appelés à devoir se remobiliser et se redéployer brutalement sur une toute autre tâche (jusque là sacrifiée sur l’autel de la priorisation) pour rattraper un retard accru par les abandons préconisés. Les agents craignent donc que le service ne soit ainsi engagé dans une course perpétuelle et entraîné dans un cercle vicieux qui ferait de leur quotidien en SIE une illustration moderne du mythe de Sisyphe.
Une telle gestion à flux tendus qui implique « des changements de cap continuels » ne semble pas véritablement propice à retrouver toute la quiétude à laquelle aspire désormais tout le SIE.
Si la Direction ne semble pas nier la réalité des difficultés éprouvées, les agents ne sauraient se satisfaire durablement de solutions qui consistent à abandonner (plus ou moins durablement certaines missions).
Leur souhait exprimé consistait à être désormais dégagés d’une pression quotidienne liée à la surcharge de travail dont ils sont trop peu nombreux à assurer la charge, ils réclamaient essentiellement des moyens leur permettant d’exercer dans de bonnes conditions les missions qui leur sont dévolues.
Le sens aigu du service public dont ils ont toujours fait preuve malgré leurs conditions de travail dégradées, ne peut que les pousser à déplorer d’ores et déjà les conséquences de cette politique d’abandon de missions à laquelle ils sont contraints de devoir se résigner faute d’obtenir les moyens suffisants. La Direction s’est en effet clairement expliquée en indiquant que la « priorisation » supposerait ainsi une réorganisation du travail qui elle-même impliquerait l’abandon (temporaire?) de certaines tâches (plus d’envois des dossiers 2004, ensilage des documents, abandon de la relance des défaillants etc.). Un abandon, sous couvert de la direction, qui va mécaniquement altérer la qualité du travail et du service rendu à l’usager.
L’aspiration de tous à une forme de visibilité, de stabilité et de sérénité ne peut à l’évidence être réellement satisfaite par ces mesures de « gestion de crise » qui aboutissent à un nouveau jeu de restructurations déstructurantes…
Les agents concernant la situation qu’ils ont portée à la connaissance de la Direction, et avec les doutes et réserves avec lesquels ils accueillent les solutions proposées restent toutefois attentifs à toute forme d’évolution et demeureront désormais mobilisés pour obtenir une amélioration effective de leurs conditions de travail.